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Les Japonais et Moi (1ère partie, mais probablement pas la dernière)

Les Japonais ont un rapport étrange avec les étrangers (ceci est un euphémisme).
Je veux bien sûr ici parler de ceux qui viennent d’un autre pays, les « Gaijin« , pas les simples inconnus… Quoique, avec eux aussi, je les soupçonne d’avoir un rapport étrange.

Parlons aujourd’hui des langues. Les Japonais sont célèbres pour être nuls en langues étrangères, en tout cas, ceux qui n’ont jamais vécu à l’étranger. Alors, certes, c’est quand même plus ou moins le cas de tous les pays monolingues (les Français sont pas non plus réputés pour être de grands polyglottes), mais cela s’exprime d’une manière assez étrange et intéressante chez les Japonais (très loin du « Ils sont en France, ils n’ont qu’à parler français » si cher à pas mal de mes compatriotes).

Il faut savoir que :

  • Plus ou moins tous les Japonais ont appris l’anglais à l’école.
  • Et par « apprendre l’anglais » j’entends: « avoir appris à le lire, voire à l’écrire, mais en aucun cas à le parler. »
  • 康代 est d’ailleurs un exemple parfait. Alors qu’elle est totalement incapable de communiquer en anglais de quelle façon que ce soit, quand elle ne connaît pas un mot en français, neuf fois sur dix, il suffit que je lui donne l’équivalent anglais pour qu’elle comprenne de quoi il s’agit.
  • Les Japonais ne sont pas habitués à être confrontés à des langues étrangères (contrairement aux Français qui en côtoient plus ou moins tout le temps).
  • Pourtant l’anglais est très commun au Japon et on le retrouvera dans des endroits et des situations qui seraient impensables dans d’autres pays. Souvenez-vous les « Meat », « Vegetables » et « Fish » dans les supermarchés. Imaginez le scandale que ce serait si un supermarché français faisait de même, c’est d’ailleurs interdit par la loi Toubon. « Quel con ce Toubon ! » Je ne l’avais pas dit depuis longtemps (depuis qu’il n’est plus ministre en fait), mais il fallait que ça sorte. Désolé, j’essaie de rester apolitique sur ce blog (pour l’instant, si jamais un jour je vis au Japon, je ne pourrai bien entendu pas m’empêcher de m’intéresser à la politique locale).

Donc, quand un Japonais rencontre un étranger, il lui parle en anglais (ou du moins essaie). Dans l’esprit d’un Japonais, l’anglais n’est pas la langue des anglophones, c’est la langue des étrangers, enfin, des étrangers non-asiatiques (disons des Noirs et des Blancs).

Et bien sûr, lors de mon voyage, chaque fois que j’allais visiter un truc, le préposé au guichet me donnait automatiquement un dépliant en anglais sans me demander quoique ce soit (savait-il seulement comment le faire ?). Au début, j’étais un peu surpris, n’étant pas habitué à être « repéré » comme étant étranger juste par mon physique (n’ayant jusqu’à présent voyagé uniquement en Europe et aux US). Et si je ne savais pas parler anglais ? De toute façon c’était ça ou rien, je les soupçonne de n’avoir aucune autre langue sous la main (chinois et coréen peut-être ?). Quoique, je me souviens qu’au château de Muragame, il y avait une petite section en espagnol sur le dépliant, ce qui, selon 康代 était chose exceptionnelle.

(Addendum – cet article ayant été originellement écrit en juin 2009 : Sophie, sur son blog, mentionnait un dépliant en français au Parc Ritsurin lors de son dernier voyage à Takamatsu en octobre 2009)

Et bien sûr, les rares fois où quelqu’un voulait me parler, il le faisait en anglais. Sauf que la plupart du temps, me voyant avec une locale, ils ne s’en donnaient même pas la peine, se doutant qu’elle expliquerait… ou s’en foutant ?

Enfin bref, heureusement que je parle anglais.
Sauf que…
Sauf que, les trois quarts du temps, je ne comprenais absolument pas ce que l’on me disait, au point que très souvent 康代 devait même me dire que c’était de l’anglais qui était parlé, voire me traduire en français les propos venant d’être prononcés (si elle ne comprend pas l’anglais parlé par un anglophone ou un francophone, elle n’a en fait que bien peu de mal à comprendre l’anglais parlé par un Japonais).

Le truc c’est qu’en japonais les lettres ne fonctionnent pas comme les nôtres…
Si vous parlez japonais, vous pouvez sauter cette section totalement, vous connaissez tout cela bien mieux que moi.
Comme vous le savez maintenant (soit parce que vous le saviez déjà, soit parce que vous êtes un fervent lecteur de ce blog), le japonais est phonétiquement uniquement constitué de syllabes de type consonne-voyelle (avec aussi des nasalisations et quelques rares diphtongues), surtout il n’est pas possible d’avoir plusieurs consonnes qui se suivent comme dans pas mal de langues européennes, en particulier l’anglais.

Donc un problème se pose quand il s’agit de retranscrire des mots anglais en japonais. Comment écrire un mot se terminant par une consonne ? Comment écrire un mot dans lequel plusieurs consonnes se suivent ?

C’est simple, des voyelles (ou plutôt des sons vocaliques) sont insérés partout où ils sont nécessaires (c’est à dire après chaque consonne qui n’est pas déjà suivie d’une voyelle). Pas n’importe quelle voyelle. La plupart du temps il s’agit de « o » ou de « ou » non accentués. Quand je dis « accentués », je parle ici d’accent tonique pas de petit trait au dessus de la lettre, mais vous m’aurez compris. Car un « o » ou un « ou » non accentué au Japon ne se prononce que peu, ou plus souvent comme un vague « eu ».

Mais à cause de cette incapacité à retranscrire plusieurs consonnes se suivant et surtout l’inexistence de ceci dans leur propre langue, les Japonais (sauf les rares ayant correctement appris la chose) ne peuvent pas prononcer plusieurs consonnes à la suite sans y insérer des voyelles ; ce qui nous donne des mots anglais bien souvent méconnaissables.

Par exemple ? Eh bien, le mot « exemple » justement. En anglais c’est « example » qui se prononce plus ou moins comme « ègzampeul », mais prononcé par un Japonais cela donnera plutôt quelque chose du genre « ègouzampeulo. »
Et au final, presque toutes les choses basiques qui m’étaient dites (parce que non, les Japonais n’essayaient pas d’avoir de longs débats philosophiques avec moi en anglais) ressemblaient à des trucs du genre: « sainquouyou », « goudobayo », etc.

Je sens que j’aurais l’occasion de revenir très bientôt sur le sujet.

3 commentaires sur “Les Japonais et Moi (1ère partie, mais probablement pas la dernière)”

  1. Alors là j'ai tout compris à ton problème de compréhension de l'anglais prononcé par un asiatique, je vis dans un county où il y a une très grande proportion d'asiatiques (coréens, chinois et japonais) et parfois je ne comprends pas ce que les gens me disent d'ailleurs certains ne me comprennent pas non plus … c'est mon french accent !

  2. *_* J’arrive super bien à comprendre les japonais quand ils parlent anglais (mater des animes a parfois du bon) mais c’est vrai que c’est particulier. Une langue à part.

    Quand j’ai pris des cours à la mairie de Paris avec pas mal de retraités, j’ai remarqué la quantité impressionnante de mot vaguement anglais en japonais. Et certains de mes camarades ne comprenait rien du tout, ne parlant pas l’anglais… Bref, pour causer japonais, faut aussi comprendre l’anglais et avoir une oreille musicale trèèès souple !

    Ton article m’a rappelé plein de bons souvenirs. J’ai quand même trouver que beaucoup de japonais s’expriment correctement en anglais (à part la prononciation particulière) dès qu’ils sont décomplexés. Et vu mon niveau en japonais, ça les décomplexe très vite…

    1. Pour les Japonais qui parlent anglais, j’en ai aussi trouvé… dans les grandes villes. À Shikoku, pour l’instant je n’en ai rencontré qu’un ou deux, je crois. Ensuite, c’est clair qu’il y a une histoire d’accent et d’habitude, je n’entends presque jamais de Japonais parler anglais, donc je ne suis pas vraiment habitué à leur accent.

      Sinon, oui, je fus effectivement surpris par le nombre de mots anglais en japonais (et d’ailleurs du coup du nombre de mots français qui sont passés par la case anglais avant d’atterrir au Japon). D’ailleurs c’est positif, je connais beaucoup plus de mots japonais que je ne le crois (tant que je rajoute des ‘o’ et des ‘u’ aux bons endroits).

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